Chers amis, le sujet que je vous
propose de discuter ce soir, vous le savez, est loin d’être
facile, même s’il peut sembler à première vue
commun. D’abord, est-il assuré que nous nous croyions
libres ? Et, à supposer que ce soit le cas, savons-nous
clairement ce qu’une telle croyance signifie ? Est-elle
vérifiée par quelque « expérience
incontestable », comme le pensait Descartes, ou est-elle
illusion comme le voulait Spinoza ? Dans un de ses ouvrage,
Arendt déclare : « Soulever la question :
qu’est-ce que la liberté ?
semble une entreprise
désespérée. Tout se passe comme si des
contradictions et des antinomies sans âge attendaient ici
l’esprit pour le jeter dans des dilemmes logiquement
insolubles ». Une telle perspective a de quoi effrayer,
même si cela peut avoir pour effet de stimuler notre
curiosité. Le mieux sera donc de commencer par une analyse des
expressions essentielles – liberté, se croire libre, une
illusion – avant d’envisager le sens global du
débat.
Un mot sur l’illusion, tout
d’abord. Je vous en proposerais volontiers la définition
suivante : une illusion est une croyance
généralement erronée, qui se distingue de
l’erreur ordinaire 1) en ce qu’elle satisfait à quelques
égards la subjectivité désirante
– Freud l’a fort bien
souligné en déclarant : « Ce qui
caractérise l’illusion, c’est d’être
dérivée des désirs les plus anciens et les plus
forts », les expressions courantes le confirment :
« se bercer d’illusions », « prendre
ses désirs pour des réalités » et
ainsi de suite 2) en ce qu’elle est enracinée dans le
vécu, constitutive du vécu, et à ce titre
quasiment indépassable. On sait que le plus grand astronome du
monde voit le soleil à deux cent pas et la lune plus
grosse à l’horizon. De même, tout amoureux croira
d’abord son amour éternel. Comme il l’avait cru du
précédent. En admettant cette analyse, il
apparaît qu’il y aurait trois questions à discuter 1) se
croire libre, est-ce une erreur ? 2) cette erreur satisfait-elle
un souhait ? 3) est-elle liée à l’ignorance
constitutive du vécu ? Dans le cadre de mon introduction,
je ne pourrai guère discuter plus, je dois l’avouer, que le
premier point ?
Considérons maintenant d’un
peu plus près l’expression « se croire
libre ». Elle est susceptible de recevoir autant de sens
divers que le mot liberté lui-même. Dans son usage le
plus commun, le mot liberté est synonyme de
« pouvoir de faire ce qu’on veut », ou
d’«absence de contrainte ». Mais l’expérience
nous l’enseigne très vite, si nous pouvons faire ce que nous
voulons, c’est souvent à la condition de ne vouloir que ce que
nous pouvons. C’est-à-dire bien peu. Nous sommes en situation,
disent les existentialistes, et toute situation comporte
nécessairement des limites à notre pouvoir de faire,
les unes de circonstance, les autres de condition. Croire
qu’« on peut faire ce qu’on veut » apparaît
donc à tous les êtres sensés comme une illusion,
un « fantasme narcissique », la sagesse
étant, comme il a été dit, de
« changer ses désirs plutôt que l’ordre du
monde »
Si la liberté est vraiment
de pouvoir faire ce qu’on veut, elle semble irréalisable au
sein de la société. En effet, il n’est pas de
société organisée qui ne fixe des limites - de
droit - à l’arbitraire individuel. Le citoyen n’a le droit de
faire que ce que les lois permettent. L’Etat peut même le
forcer à obéir. Donc, si par hypothèse, la
liberté est d’agir selon son bon plaisir, il n’est pas de
liberté dans la cité. Mais cependant, nous faisons une
réelle différence entre la tyrannie et le gouvernement
légitime, de même que nous distinguons la soumission
à l’arbitraire du tyran et l’obéissance à la
loi. Si ces distinctions ont un sens, il doit être possible de
réconcilier la liberté et la vie dans la cité.
Lisons la célèbre définition de la
liberté proposée par Montesquieu :
« Dans un Etat, c’est-à-dire dans une
société où il y a des lois, la liberté ne
peut consister qu’à pouvoir faire ce que l’on doit vouloir, et
à n’être point contraint de faire ce que l’on ne doit
pas vouloir ». Le problème qui subsiste cependant
est de savoir si le jugement qui distingue tyrannie et régime
légitime a une valeur objective ou s’il n’est que le reflet de
l’opinion partisane du citoyen. On sait par expérience que le
partisan de l’oligarchie ne juge pas en règle
générale que le régime oligarchique soit un
régime tyrannique, il réserverait plutôt cette
appréciation au gouvernement « du
peuple ».
Quoi qu’il en soit,
l’obéissance à la loi ne peut être libre, dans
son fond, que si elle est résulte du libre arbitre de la
volonté. Le problème fondamental de la liberté
concerne donc par dessus tout « le libre arbitre du
vouloir ». C’est lui qui est au cœur des discussions
philosophiques. Le libre arbitre signifie que nous avons ou pensons
avoir le pouvoir réel de choisir entre plusieurs actions
possibles et de nous déterminer pour l’une d’entre elles, tout
en gardant entièrement le pouvoir de faire un autre choix.
Essayons de comprendre. Je dis oui le jour de mon mariage, j’ai
toutes sortes de raison de dire oui, mais mon oui est libre si j’ai
le pouvoir de dire non. Le pouvoir des contraires, telle serait la
signification du libre arbitre. Par exemple, le pouvoir de choisir de
participer à une discussion philosophique, ou non. De jeter la
cargaison à la mer pour sauver le navire dans la
tempête, ou non.
Se croire libre, c’est donc
s’attribuer le pouvoir de faire des choix, sans être
déterminé à l’une des alternatives plutôt
qu’à l’autre. Il nous reste maintenant à tenter
d’expliciter ce que cela implique.
D’abord, le pouvoir effectif de
choix n’est pensable et ne peut s’exercer que sous deux conditions.
La première est la faculté de réfléchir,
de délibérer, de peser le pour et le contre, autrement
dit, l’usage de la raison. Si l’homme peut être libre, c’est en
vertu de la raison. C’est elle qui le met en mesure de se
représenter les possibles et leurs conséquences.
Détruisez la raison, vous abolissez du même coup la
liberté. La seconde , c’est qu’aucun
désir, aucun penchant ne soit assez puissant pour
déterminer le choix, pour rendre impossible le parti
contraire. Comme dit Leibniz, nous pouvons être inclinés
par le désir – tout choix exprime un désir – mais nous
ne serons libres qu’à la condition de ne pas être
déterminés par lui. Le désir ne doit donc pas
être seul à parler.
Le libre arbitre du vouloir
subsisterait en son entier même si nous étions soumis
à une dictature, privés de la liberté
individuelle, de la liberté d’expression, de la liberté
de conscience. La police du tyran, en effet, pourrait sans doute nous
empêcher d’exprimer ce que nous pensons, mais elle ne pourrait
pas nous empêcher de le penser, de choisir entre plusieurs
croyances possibles ? Enfermé dans une prison, un
homme ne peut
manifestement pas faire ce qu’il veut. Quoiqu’il entreprenne, il sera
arrêté par les murs. Mais il n’est pas privé pour
autant de la faculté de faire le choix entre se
résigner à sa nouvelle condition, ou au contraire
former le projet de s’évader. Le libre-arbitre, s’il est
réel, est donc un absolu. Ou bien il est donné dans
toutes les situations, même dans celles qui semblent
correspondre au pire des esclavages, ou il n’est donné en
aucune. Sartre a donc pu dire sans
absurdité :
« Jamais nous n’avons été plus libre
que sous l’occupation allemande ».
Si nous avons le libre arbitre de
la volonté, notre vie ne peut pas être un destin
fabriqué d’avance par une mystérieuse fatalité.
Nous ne pouvons nous penser sans mauvaise foi comme une
« marionnette » de la divinité, comme le
jouet de pulsions inconscientes, comme le produit d'une nature
donnée, ou comme le résultat d’une multiplicité
de circonstances qui ont décidé de nous à notre
place. Au début des
réflexions sur l’éducation, Kant écrit :
« Par son instinct, un animal est déjà tout
ce qu’il peut être. Une raison étrangère a
déjà pris soin de tout pour lui. Mais l’homme doit user
de sa propre raison. Il n’a point d’instinct, et doit se fixer
lui-même le plan de sa conduite ». On ne saurait
mieux faire comprendre l’ambiguïté de la liberté.
Etant ce par quoi on échappe à un destin fixé
par la nature, elle signifie du même coup notre initiale
indétermination. Etant ce par quoi il nous est en quelque
sorte imposé de nous définir, elles est aussi ce qui
met par là même le comble à notre
responsabilité.
La croyance au libre-arbitre a donc
une singulière importance morale. A travers elle, nous
soutenons que nous ne sommes pas de simples créatures
d’instinct et de désir. Nous affirmons notre
responsabilité. Notre valeur éminente. C’est en ce sens
que nous donnons raison à Descartes lorsqu’il affirme :
« Que la principale perfection de l’homme est d’avoir un
libre arbitre, et que c’est ce qui le rend digne de louange ou de
blâme ».
Mais – et c’est bien là que
gît la difficulté proprement théorique qui est
à l’origine de notre interrogation- « il y a
contradiction entre la conscience qui nous dit que nous sommes
libres, et la raison qui ne peut renoncer à appliquer le
principe de causalité au monde dont nous faisons
quotidiennement l’expérience, qu’il s’agisse de la nature, de
la société, ou de la vie
psychique ».
Permettez-moi de citer ici Spinoza.
Dans l’appendice de la première partie de l’Ethique, le
philosophe déclare : « Les hommes se croient
libres, pour la raison qu’ils ont conscience de leurs désirs
et de leurs volontés, et que les causes qui les disposent
à désirer et à vouloir, ils les ignorent et n’y
pensent pas, pas même en rêve ». Très
clairement, il soutient en ce propos 1) que la croyance à la
liberté est si générale et répandue
qu’elle peut être tenue pour une caractéristique de
l’homme 2) que cette croyance n’a d’autre base que l’ignorance dans
laquelle chacun se trouve, et de lui-même, et des causes qui
« déterminent » les désirs qu’il
ressent et les décisions qu’il croit prendre 3) que s’il se
pensait en vérité, l’homme devrait renoncer à
croire qu’il est « un empire dans un empire »,
mais comprendre au contraire que ses volontés font partie du
réel, qu’elles sont soumises comme tout le reste au principe
de raison suffisante, qui implique que rien ne soit sans raison et
sans cause. Le sentiment de liberté relève donc du
vécu, de la connaissance confuse et mutilée, non de la
pensée claire.
La raison fondamentale pour faire
de la croyance au libre-arbitre une illusion est certainement la
doctrine du déterminisme, selon laquelle tout
événement – physique ou psychique – est le rejeton de
causes antécédentes. Pour le déterministe, le
passé est maître du présent, et le présent
est maître de l’avenir. Ce que nous faisons découle de
ce que nous sommes, et ce que nous sommes résulte du
passé. Aussi, un esprit suffisamment puissant, disposant de
toutes les lois de la nature, et de la connaissance de toutes les
circonstances, serait-il en mesure de prédire tous les
évènements futurs. Appliquée aux faits
psychologiques, la doctrine déterministe postule qu’il y a
nécessairement une motivation inconsciente à chacune de
nos passions, à chacune de nos volontés, à
chacun de nos actes. Ce que Freud a pu montrer au sujet des
rêves, des actes manqués, des symptômes de la
névrose, et même plus généralement de nos
sentiments et de notre caractère, à savoir qu’ils
trahissent ou révèlent les tendances profondes,
refoulées, inconscientes, il faut le dire aussi, selon le
déterministe, de nos choix. Ou alors renoncer au principe de
causalité comme au principe d’identité. Prenons un
exemple fort simple, caricatural peut-être. Je décide de
voter pour Mr « x » aux élections
municipales. Le partisan du libre-arbitre soutiendra que j’aurais pu
voter autrement, ou choisir de ne pas voter. Mais cela n’a pas de
sens aux yeux du déterministe. Mon vote est une suite de mes
tendances, de mon éducation, de la compréhension plus
ou moins claire que j’ai de mes intérêts, du sens plus
ou moins aigu que j’ai des exigences de la justice. Pour voter
autrement, il faudrait que je sois un autre, ou que je puisse
être à la fois celui que je suis (qui vote d’une
certaine manière) et celui ,que je ne
suis pas, et qui pourrait voter autrement. Sartre l’admettrait,
puisqu’il définit l’homme comme cet être qui est ce
qu’il n’est pas et qui n’est pas ce qu’il est. Mais c’est en rupture
avec le principe fondamental de la raison scientifique, avec le
principe d’identité.
Il existe un autre argument
très parlant contre la croyance à la
liberté : il est tiré du constat de notre
primordiale faiblesse. Si nous étions vraiment libres, il nous
suffirait de « bien juger pour bien faire ». Mais
encore faut-il bien juger, encore faut-il que le jugement ait une
puissance souveraine en nous. Or que nous enseigne
l’expérience courante ?
« l’impuissance humaine à
maîtriser et à contrarier les affects ».
Spinoza déclare : « l’homme soumis aux affects
est sous l’autorité non de lui-même, mais de la fortune,
au pouvoir de laquelle il se trouve à ce point qu’il est
souvent forcé, quoi qu’il voie le meilleur pour
lui-même, de faire pourtant le pire ». Être
dominé par la passion, par les préjugés,
voilà en somme la condition la plus commune des hommes. Pour
cette raison, on peut se demander s’il n’est pas présomptueux
de se croire libre, s’il ne s’agit pas d’un refus de regarder en face
la véritable tâche qui nous incombe : devenir plus
puissant, moins vulnérable, plus conscient de notre esclavage.
La liberté n’est pas quelque chose qui est, elle est en
souffrance, en instance. Pour l’atteindre, il faut d’abord se
désaliéner. Or, dans un passage où il aborde la
question, Sartre écrit : « bien plus qu’il ne
paraît se faire, l’homme semble être fait par le climat
et la terre, la race et la classe, la langue, l’histoire de la
collectivité dont il fait partie,
l’hérédité, les circonstances individuelles de
son enfance, les habitudes acquises, les grands et les petits
évènements de sa vie ». Que pourrait-on dire
de plus définitif contre l’idée de
liberté ?
Il y a donc en philosophie deux
thèses adverses. Elles traduisent un conflit inévitable
entre le point de vue de la science, qui est dans une certaine mesure
celui du déterminisme, et le point de vue de la conscience
naïve qui adhère malgré tout à la
liberté. Je voudrais montrer brièvement pour quelles
raisons je ne suis pas convaincu que le point de vue de la conscience
naïve doive être récusé.
Raison théorique tout
d’abord, il me semble que la doctrine du déterminisme rend
rigoureusement incompréhensible un fait massif
et indiscutable, je veux
dire le fait de l’histoire. Pour qu’il y ait histoire, il faut en
effet que les hommes s’arrachent à la fois au code
comportemental qu’ils doivent à la nature et à celui de
la culture qui les a conditionnés. Marx a parfaitement
formulé le problème : « La doctrine
matérialiste qui veut que les hommes soient des produits des
circonstances et de l’éducation, que par conséquent,
des hommes transformés soient des produits d’autres
circonstances et d’une éducation modifiée, oublie que
ce sont précisément les hommes qui transforment les
circonstances et que l’éducateur a lui-même besoin
d’être éduqué. C’est pourquoi elle tend
inévitablement à diviser la société en
deux parties dont l’une est au-dessus de la
société ». Donc, ou bien les hommes sont
libres au lieu d’être conditionnés intégralement
par la nature et la société, et dans cette
hypothèse l’histoire est pensable, ou bien en
définitive ils ne sont pas libres, et l’histoire devient un
mystère incompréhensible, à moins qu’elle ne
soit l’œuvre d’une surhumanité placée par nature
au-dessus de l’humanité vulgaire.
Du point de vue moral, la seule
justification –toute relative- qu’on pourrait alléguer en
faveur de la doctrine déterministe serait qu’elle nous
enseigne, comme le voulait Spinoza, à ne pas rire, ne pas
pleurer, ne pas détester, mais à comprendre, et
qu’à ce titre elle est susceptible de nous délivrer
mieux que d’autres doctrines des passions dites tristes – comme
l’idée de tirer vengeance d’une injure, ou de se mettre en
colère contre un goujat. En effet, comment serait-il
cohérent, du point de vue déterministe, d’en vouloir au
goujat ? Sa goujaterie n’est-elle pas une expression de sa
nature, et sa nature une conséquence fatale du tout des
causes ! Mais qui ne voit la limite de l’argument, les impasses
où il nous entraîne ? Le déterminisme
absolutisé conduit nécessairement à une
chosification de l’humain. On serait goujat, par nature, on ne se
choisirait pas goujat, pas plus qu’on ne se choisirait philosophe ou
financier. On n’aurait donc jamais à répondre de soi.
On serait quitte également de tout effort moral, de tout
travail sur soi.
Aristote avait sans doute une vue
plus juste lorsqu’il montrait que nos vertus et nos vices ne sont pas
« naturels » mais résultent de nos actes,
et sont des habitudes que nous contractons au départ
librement. On ne peut pas être juste si dans une certaine
mesure on ne se choisit pas juste. L’homme n’est pas un figuier qui
ne produit ses fruits que quand c’est la saison des figues. La
volonté est toujours volonté de volonté. Une
décision ne peut pas réduite à un fait. La
décision par définition doit être constamment
soutenue par la subjectivité qui se définit par elle.
César a franchi le Rubicon plusieurs fois, il devait porter
cette décision dans l’être jour après jour.
Nietzsche dans le « crépuscule des
idoles »
dénonce la
doctrine du libre arbitre comme un produit de « l’instinct
de punir » : « Si l’on a conçu les
hommes libres, c’est à seule fin qu’ils puissent être
jugés et condamnés, afin qu’ils puissent devenir
coupables ». Il ajoute dans un grand élan de
lyrisme : « On est nécessaire, on est un
fragment de fatalité ». Soit. Mais rien ne prouve
que le refus de blâmer qui résulte logiquement, en
effet, de la négation du libre arbitre, soit si favorable
à l’homme. On l’honore sans doute bien plus en refusant de le
chosifier, en pensant qu’il est ce qu’il se fait
être!
Pour toutes ces raisons, je ne peux
croire que le point de vue de la conscience qui se croit libre soit
réfuté, ni même réfutable. J’irais
même plus loin. La liberté est, selon moi, ce qui donne
un sens à la raison, à la justice et à la
moralité. Ou bien l’homme est libre, ou bien la raison, la
faculté de délibérer et d’envisager des
possibilités est parfaitement superflue. Or, de cette
faculté de délibérer, nous avons
l’irrécusable expérience. Elle est une donnée de
la conscience. Elle a la même certitude que la conscience. Par
ailleurs, quel serait le sens des lois et des droits si l’homme
n’était pas libre ? Comment une obligation pourrait-elle
avoir un sens pour qui n’est pas capable de choisir ? Ou bien la
morale est un vain mot, ou bien la liberté n’est pas une
chimère.
Conclusion.
Loin de penser que la croyance
à la liberté soit une illusion, il me semble que c’est
en fin de compte le déterminisme absolu qui constitue un
délire. Une erreur sur la signification et la portée du
projet de la science. Vouloir expliquer ou comprendre
scientifiquement l’homme est légitime, à condition de
ne pas croire qu’on puisse jamais fournir une explication
totale ou suffisante. La science elle-même n’a en
réalité d’autre fondement que la liberté du
jugement, laquelle est le principe, le point de départ de la
liberté tout court. Revenons donc pour finir à ce qu’a
su dire le grand Descartes : « Que nous avons un
libre arbitre qui fait que nous pouvons nous abstenir de croire les
choses douteuses, et ainsi nous empêcher d’être
trompés ».
Claude Ménard
Jeudi 22 mai 2008
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